« Un peuple qui élit des corrompus, des renégats, des imposteurs, des voleurs et des traîtres n’est pas victime ! Il est complice ». Georges Orwell


mardi 27 novembre 2012

Scandales municipaux - Le départ d’un maire

Le maire de Toronto, Rob Ford, s’adressant aux médias, lundi, après que La Cour supérieure de l’Ontario eut décidé de le destituer.

Josée Boileau
27 novembre 2012
Le Devoir  

On ne pouvait imaginer meilleur contraste. D’un côté, le maire de Toronto, Rob Ford, destitué pour une affaire de papier à lettres. Au Québec, même être accusé de fraude ne suffit pas pour pousser un maire hors de son siège, comme le prouve Richard Marcotte à Mascouche. Et la commission Charbonneau qui en a encore ajouté une couche… Il y avait bel et bien un parfum de laxisme dans l’air lundi.

On aura beau croire que le même esprit les habite, les mécaniques judiciaires et les lois distinguent le Québec de l’Ontario en matière de conflits d’intérêts. Ainsi, à partir du moment où le maire de Toronto était reconnu coupable d’avoir contrevenu à la Loi sur les conflits d’intérêts municipaux, une seule sanction était possible : la destitution.

La même intransigeance se retrouve ailleurs. À Toronto toujours, le code municipal précise qu’il faut être inscrit en bonne et due forme au registre des lobbyistes pour pouvoir traiter avec les élus. De même, les conversations informelles que les citoyens peuvent avoir avec un décideur sont « encadrées » : une rencontre à l’improviste ne doit jamais être l’occasion d’influencer un décideur, qu’il soit élu ou fonctionnaire.

Le Québec n’a pas, et ne prévoit pas avoir, de telles dispositions. Au printemps dernier, le commissaire au lobbyisme n’a pas voulu pousser aussi loin ses recommandations de changements législatifs. L’exigence ontarienne semblait en effet bien puriste. Mais à la lumière de ce que l’on entend à la commission Charbonneau, comme ce fut encore le cas lundi, ce purisme a quelque chose de salutaire.

Ainsi du jugement de la Cour supérieure sur Rob Ford qui reprend les mots de la commissaire à l’intégrité de Toronto. Celle-ci insiste sur un point : un donateur potentiel risque fort d’être influencé par la position occupée par celui qui demande. Le motif du financement (dans le cas du maire Ford, une activité de charité) n’a aucune importance, c’est la manière de faire qu’il faut superviser.

Or, au moment même où la décision ontarienne était rendue, Michel Cadotte, de la compagnie IPEX, était en train de raconter à la commission Charbonneau sa participation à des activités de financement pour le parti de l’ex-maire de Montréal, Gérald Tremblay. Une occasion pour M. Cadotte de faire valoir au maire la qualité des tuyaux en PVC fabriqués par sa compagnie (matériel utilisé dans 95 % des villes du Québec, mais que Montréal refuse curieusement, préférant les tuyaux en fonte). Une occasion aussi de faire un chèque à la firme de génie qui avait organisé la rencontre, pourtant destinée à des fins politiques. Lobbyisme, tentative d’influence sur un décideur, contournement de la loi sur le financement des partis : il y avait là bien des « méthodes » à dénoncer !

Ce genre de rencontres a pu pourtant avoir lieu impunément, à Montréal, à Laval comme ailleurs au Québec, pendant des années. « Trente ans ! », a dit lundi un autre témoin de la commission, Piero Di Iorio, pour résumer les assises bien solides de la collusion à Montréal. On en a d’ailleurs maintenant bien compris le fonctionnement, mais on reste ébahi, au fil des témoignages, de son ampleur et de sa notoriété.

Rob Ford se plaint qu’un complot gauchiste a eu sa peau à Toronto. C’est plutôt la force des mécanismes d’encadrement qui a eu raison de son attitude je-m’en-foutiste, véritable contre-pouvoir quand le pouvoir dérape. Toronto a son commissaire à l’intégrité depuis 2004, Montréal n’a toujours qu’un conseiller… Ceci explique en partie les cela énoncés par Cadotte, Di Iorio et compagnie. Oui, l’Ontario a des leçons à nous donner.

***

Au Québec, est-ce parce qu'on est plus colonisés qu'ailleurs, au Canada, qu'on n'ose pas se montrer intraitables juridiquement parlant, "par la force des mécanismes d’encadrement", à l'égard des escrocs et des ripoux de tout genres? D'abord, et avant tout,  de ceux qu'on aurait élus ... par erreur sur la personne.

Merci, madame Boileau,  de dire tout haut ce qu'on pense depuis longtemps. Et qui nous rend si en colère. Mais il est vrai qu'au Québec: «On montre nos grosses dents, mais aucune mâchoire pour attraper Commentaire: Carole Dionne, inscrite, Le Devoir.

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