Antoine Robitaille,
15 novembre
Le Devoir
Il est préférable, dit une règle non écrite, qu’un critique dans
l’opposition, à l’Assemblée nationale, n’hérite pas de « son » dossier
lorsqu’il passe au gouvernement. S’il devient ministre de l’Éducation,
par exemple, après avoir été « porte-parole » en ce domaine, cela veut
dire qu’il fut, pendant des années, le relais des griefs et doléances de
multiples « clientèles » reliées à ce même domaine. Et comme ministre,
il pourrait donc plus facilement se trouver inféodé à ses anciens
alliés. (N’est-ce pas un risque que court Marie Malavoy ?)
Avec la sortie déchaînée et disgracieuse, mardi, du porte-parole
libéral en santé, Yves Bolduc, contre le ministre péquiste Réjean
Hébert, peut-être faudrait-il formuler une règle inverse : il est
malsain qu’un ancien ministre conserve son dossier lorsqu’il traverse
dans l’opposition officielle. Plusieurs ont été surpris de la véhémence
avec laquelle M. Bolduc a attaqué en Chambre le ministre Hébert, violant
toutes les règles de l’auguste enceinte : ne pas user du tutoiement ;
ne pas s’adresser directement à l’élu concerné. « Là, tu viens de
démontrer complètement que tu ne connais pas ton réseau de la santé et
que tu ne connais pas du tout tes dossiers. Vas-y donc, à Alma ! », a
hurlé M. Bolduc mardi. Plusieurs ont eu envie de lui dire : Les nerfs,
Yves !
« Malsain » est le bon mot ici. M. Bolduc ne semble pas être en mesure
de prendre la nécessaire distance avec « ses » dossiers afin de se
montrer bon critique. « Ses » dossiers, c’est-à-dire, d’abord, l’hôpital
d’Alma, où lui-même a pratiqué ; ensuite, l’agrandissement de l’urgence
de ce même hôpital, travaux que M. Bolduc a personnellement inaugurés
le 16 mai, en pleine fièvre pré-électorale.
Selon M. Hébert, M. Bolduc avait alors donné le coup d’envoi à une
première phase de la rénovation, celle du stationnement, alors que la
deuxième n’avait pas été prévue dans les crédits. Joint hier, M. Bolduc
l’a reconnu, mais en soutenant que la phase 2 devait être entamée en
avril 2013 seulement et ne nécessitait donc pas de figurer aux crédits
dès 2012.
Si le gouvernement fait « quelque chose de bien », il n’hésitera pas à
le souligner, a du reste certifié M. Bolduc. Mais quelle décision
correcte pourrait donc émaner d’un homme qu’il a déjà traité d’«
incompétent total » (M. Hébert est pourtant en poste depuis un mois
seulement !). M. Bolduc a en plus reproché au ministre d’avoir pris «
des notes comme un étudiant » lors d’une réunion, ce qui prouverait
qu’il ne connaît « rien ». Il l’a qualifié de « théoricien » qui « n’a
pas mis le pied dans un hôpital depuis 10 ans », ajoutant : « Quand vous
écoutez ses réponses, là, c’est des réponses de livres. »
L’aigreur de la défaite doublée du sentiment d’avoir été délogé par un
imposteur n’est certainement pas bonne conseillère pour un critique.
Le 12 septembre, le chef libéral par intérim Jean-Marc Fournier avait
promis de faire de la politique « dans le respect » : « On a eu, […] de
la part de l’opposition officielle, un ton et une méthode qui étaient
plutôt durs. […] Je ne pense pas que ça a donné de la confiance au
public à l’égard de leur parti. » M. Bolduc devrait méditer ces belles
paroles. Sinon, il devrait penser à changer de dossier.
***
Un lecteur a écrit: « Les libéraux sont de très mauvais perdants. Il est manifeste que les libéraux sont aigris de leur défaite (électorale) et sont devenu hargneux. À voir Yves Bolduc, Hamad et Thériault insulter les ministes du gouvernement, ils sont proches de la crise de nerfs. Pauvres eux , lorsque la commission Charbonneau sera au coeur des scandales gouvernementaux , ils vont capoter et ce sera pas beau a voir»
Suis bien d'accord avec vous, M. Carrier.
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