À ma petite soeur,
Lolo.
Avec toute mon
affection.
Marcel Bernier
Tribune libre de Vigile
mercredi 26 mars
Comme électeur québécois, appelé à choisir un nouveau gouvernement, j’ai l’embarras du choix. Étant d’un tempérament pragmatique, Québec solidaire, comme parti politique, m’amène à m’interroger, non pas sur sa pertinence, cela va de soi, mais sur mon adhésion à ses visées, ce 7 avril prochain. Pour me faire une tête, il me faut mettre de l’ordre dans mes propres appartenances puisqu’il ratisse large dans le domaine des idéologies. À prime abord, je constate que ses dirigeants et ses membres ont eu la bonne idée de récupérer tout ce qui dépasse en termes de contre-culture pour l’abriter sous le parapluie de la lutte anticapitalisme, de la lutte anti-impérialiste et surtout de la lutte des classes. Je souligne « en lutte » pour faire une fleur à la porte-parole de ce parti, Françoise David.
C’est toute une tâche de concilier les courants politiques qui ont cours dans ce parti, dont la caractéristique principale est l’incohérence érigée en système. Cela se vaut ! Il n’y a qu’à constater comment les partis qui ont érigé la maxime « tout ce qui est réel est rationnel et tout ce qui est rationnel est réel » se sont fourvoyés dans leur finalité au détriment des moyens à être employés pour aboutir à leurs objectifs. En jouant sur tous les tableaux, indépendantiste d’un côté, fédéraliste de l’autre, se voulant anti-impérialiste d’une part et faisant allégeance à la Couronne britannique, symbole même de cet impérialisme, d’autre part, se déclarant nationaliste et poursuivant des buts internationalistes, on se retrouve devant un vrai capharnaüm ! Un bar ouvert et un buffet à volonté ! Peu importe le flacon, pourvu qu’il y ait l’ivresse ! Une chatte n’y retrouverait pas ses chatons ! Et c’est le but ! La confusion des genres est forte d’une moisson de votes.
Parlant de gent féline, certains se sont offusqués de voir madame Payette affubler notre mère Thérèsa du qualificatif de « chat de gouttière ». On peut y voir une connotation de combativité, agréable à entendre, puisque la principale intéressée traîne derrière elle une réputation de petite bourgeoise maoïste d’Outremont. Tant qu’à faire une critique constructive, il serait plus pertinent de faire le procès de sa posture en faveur du « lumpenprolétariat » : se poser en représentante de ces déshérités, laissés-pour-compte, oblitérer leur prise de parole pour y substituer sa grandeur d’âme et sa propre conscience politique tout en les laissant patauger dans leur misère. Une bonne séance de théâtre de l’opprimé ou de théâtre-forum pourrait bien la resituer dans son combat d’élite contre les élites. Je la compare à cette madame de la Saint-Vincent-de-Paul qui vous fournit un bon d’alimentation et vous demande vos reçus d’épicerie. Aussitôt qu’elle constate que vous achetez des produits qu’elle considère comme laissant entendre que vous vivez au-dessus de vos moyens, elle subodore d’autres sources de revenu et vous coupe les vivres. Alors que tout ce que vous revendiquez, c’est de pouvoir vous payer certaines douceurs et, mieux encore, les moyens de satisfaire vos propres besoins.
Tout cela nous amène, dans notre réflexion d’électeur en puissance, à considérer l’appartenance de classe et la reproduction des schèmes de pensée de l’idéologie dominante. Le combat des élites contre les élites, en laissant de côté le prolétariat, élément perturbateur s’il en est. De voir un représentant de Québec solidaire, médecin de profession, proférer des gros mots à l’endroit d’un Henri-Paul Rousseau ou d’un Lucien Bouchard épate la galerie, mais ne change pas grand-chose à la condition prolétarienne. Un certain manifeste, et ce n’est pas celui du parti communiste, revendiquait de tout mettre en œuvre pour que le peuple du Québec prenne définitivement en mains son destin. Les membres de Québec solidaire devraient s’en inspirer. Tout autant que la scansion suivante « Travailleurs du Québec, commencez dès aujourd’hui à reprendre ce qui vous appartient ; prenez vous-mêmes ce qui est à vous. Vous seuls connaissez vos usines, vos machines, vos hôtels, vos universités, vos syndicats ; n’attendez pas d’organisation miracle. » devrait être source d’inspiration et servir en guise de vade-mecum.
Chose promise, chose due, le haïku en question :
« Le chacal hume la rose
Laissant les miettes de pain aux oiseaux »
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