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Il
faut avoir un certain culot ou avoir la mémoire courte, voire aucune mémoire,
pour affirmer comme l’a fait le chroniqueur de La Presse Pierre-Yves McSween,
que « le Parti québécois joue à l’autruche en tentant de marginaliser la réflexion
de Jean-François Lisée ». Plus loin, il affirme, comme pour prouver le
conflit d’intérêt qu’il pourrait y avoir : « D’ailleurs, le jour de l’annonce
du financement public de l’amphithéâtre, un journaliste de Québecor me disait « on
ne crache pas sur la main qui nous nourrit ».
À
la rigueur, je pourrais qualifier cela de ragot de salle de rédaction et
m’inventer, moi aussi, un journaliste de Gesca qui m’aurait affirmé la même
chose, à l’occasion de commenter la parution du livre de Robin Philpot,
Derrière l’État Desmarais : Power, paru une première fois en 2008 puis
réédité dernièrement et qu’il venait de recevoir en service de presse.
« On ne crache pas sur la main qui nous nourrit. »
Mais
pourquoi inventer des faits quand ils existent réellement. Il y a vingt ans, en
février 1994, le chroniqueur de La Presse, André Pratte, avait été démis de ses
fonctions à la suite d’une chronique, Tout est pourri, qu’il avait publiée dans
le journal où il travaillait et dans lequel il mettait en cause son patron,
Power Corporation, le propriétaire de La Presse.
Étant
donné les liens qui unissaient le père de Pratte à Paul Desmarais - il a siégé
aux conseils d’administration de Power corp. et de la Financière Power -,
sa suspension avait été vite levée et le chroniqueur avait pu réintégrer son poste
quelques jours plus tard. Même le syndicat des journalistes de La Presse avait
dénoncé cette mesure et crié à l’ingérence et à la censure. Monsieur McSween
joue-t-il à l’autruche en faisant mine d’oublier cette épée de Damoclès qui est
suspendue au-dessus de la tête des journalistes de La Presse ?
Mais
il y a plus, et le chroniqueur du Devoir, Michel David, semble, lui aussi,
victime d’un profond trou de mémoire. Dans une chronique récente, David accuse
le Parti québécois de jouer à l’autruche et d’être aveuglé par la possibilité
de voir un candidat comme PKP accéder à la direction du PQ et de redonner vie à
l’idée d’indépendance. Et il se questionne béatement : « Si un des
frères Desmarais envisageait de devenir chef du PLQ sans se départir de ses
intérêts dans Power Corporation, ils [les péquistes] se déchaîneraient ».
Est-il
besoin de rappeler que l’actionnaire de contrôle de La Presse, la famille
Desmarais, qui a passé des ententes secrètes avec Radio-Canada (jamais
dévoilées malgré l’insistance de Québecor pour qu’elles soient rendues
publiques), n’a pas besoin de se présenter à la direction du PLQ pour le
diriger et imposer ses volontés. Elle tire les ficelles dans les coulisses,
sans avoir de compte à rendre à qui que ce soit, et encore moins à la Fédération
professionnelle des journalistes du Québec (FPJQ). Cela est largement documenté
dans plusieurs ouvrages ou de nombreuses publications. Il suffit de taper Power
ou Desmarais sur Google pour s’en rendre compte.
Paul
Desmarais a déjà admis qu’il avait pris le contrôle de La Presse pour empêcher
l’indépendance du Québec et bloquer la gauche et les syndicats qui
contrôleraient le PQ, selon lui. Il a aussi avoué qu’il ne pouvait se permettre
de le faire avec Le Devoir, qui était malheureusement contrôlé par une
fondation et qui était un repère de gauchistes et de séparatistes. Un
ambassadeur des États-Unis au Canada, David Jacobson, a même admis que
l’influence de Power Corporation sur les milieux politiques québécois et
fédéral est indéniable.
Le
clan Desmarais a étendu son influence jusqu’en France, en prenant en charge
Nicolas Sarkozy, alors président de la France, pour qu’il supprime tout appui à
un éventuel Québec indépendant. C’est à cause de Desmarais que la France, du
temps de Sarkozy, a abandonné la politique traditionnelle de « ni
ingérence ni indifférence ».
Voici
ce que disait le journaliste Alec Castonguay de Paul Desmarais dans L’actualité
du 9 octobre 2013 : « Qu’il le fasse pour lui, pour son entreprise,
ou pour ce qu’il juge être « le bien du pays », Paul Desmarais avait
une influence politique certaine. Il pouvait passer un coup de fil à un premier
ministre ou un ministre sans difficulté.
Rares
sont les citoyens qui ont cet accès pour se faire entendre et exprimer leur
point de vue. » Qu’est-ce qu’on attend pour alerter le commissaire à
l’éthique afin qu’il ouvre une enquête en profondeur sur le PLQ et ses
dirigeants ? Le commissaire à l’éthique jouerait-il, lui aussi, à
l’autruche ?
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