Dominique Payette, les constats que vous dressez sur le contenu des émissions des radios de Québec dans votre rapport L’information à Québec : un enjeu capital
 touchent leur cible. Les réactions des principaux concernés les 
démasquent une fois de plus : elles sont dignes de voyous de ruelle 
rompus à l’intimidation. Ils attaquent en bande : « Allez, crient-ils, toute la gang ensemble, on lui pète la gueule ! »
 Une belle unité stalinienne lie les Fillion, Maurais, Dupont, Napoli, 
Bouchard, Ségal et Landry, qui n’ont même pas lu votre étude. Le pire 
est que vos propos sont modérés. Le portrait s’avère en réalité encore 
plus sombre.
La vérité, c’est que les radios de droite à Québec enveniment 
vraiment le climat social de Québec. J’y ai vécu 38 ans, et les 
boycotter est inutile, leur fiel s’immisce dans tous les endroits 
publics, colore toutes les conversations. Il suffit d’écouter les 
passagers de l’autobus ou la station syntonisée par le chauffeur, de 
magasiner à Place Laurier ou de faire la file au Centre Vidéotron pour 
reconnaître les raisonnements spécieux et fallacieux entendus à la radio
 et recrachés tels quels, sans filtre.
Aucun contre-discours
La vérité, c’est qu’il n’existe aucun contre-discours crédible sur 
les ondes de Québec : les droitistes forment un troupeau uni qui 
monopolise les micros. La vérité, c’est qu’aucun indépendantiste ou 
« gauchiste » n’a passé le test d’embauche dans ces trois radios depuis 
des décennies, alors qu’au moins 50 % des gens de Québec partagent ces 
idées. Sylvain Bouchard peut donc dormir tranquille, il ne perdra jamais
 sa job.
La vérité, c’est qu’à Québec, les clones d’Elvis Gratton ont pris le 
contrôle du crachoir et envoient paître systématiquement tous ceux qui 
ne pensent pas comme eux.
La vérité, c’est que ces animateurs sont les émules et les 
descendants de grand-papa André Arthur, qui a patiemment semé son style 
empoisonné non seulement à Québec, mais aussi à Saguenay (Myriam Ségal),
 Montmagny et Rivière-du-Loup (Daniel Saint-Pierre), où il tient 
chronique.
La vérité, c’est que ces animateurs connaissent très bien le poids 
des mots et les font servir à leurs fins. Connotés négativement : 
« syndiqué », « séparatiste », « péquiste », « québécois », 
« francophone », « gauchiste », « intellectuel » et 
« environnementaliste ». Leurs préférés : « environnementeur » ou 
« enverdeur ».
Connotés positivement : « travailleur non syndiqué », 
« fédéraliste », « libéral », « canadien », « anglophone », 
« conservateur », « militaire », « caquiste » et « pétrole ».
La vérité, c’est que ces radios sont, sur le plan politique, le bras 
médiatique des partis fédéralistes de droite. En 2014, c’était le Parti 
libéral du Québec. En 2015, le Parti conservateur du Canada. Leurs idées
 sont louangées et leurs élus acclamés, jouissant du privilège 
d’entrevues mielleuses, complaisantes. Je ne serais d’ailleurs pas 
surpris qu’on découvre que ces partis les financent en sous-main.
Jouer aux victimes
La triste vérité, c’est que même quand leurs idées triomphent 
politiquement, ils continuent à pleurnicher et à jouer aux victimes 
d’une gauche qui n’a pas plus de pouvoir politique en 2015 qu’elle n’en a
 eu depuis… Adam et Ève.
La vérité, c’est qu’il ne s’agit pas de radios d’opinion, mais de 
radios à une seule opinion, uniforme. En fait, ils logent à l’enseigne 
des libertariens. Mais ça, ils ne l’avoueront jamais.
La vérité, enfin, c’est que ces radios sont si anglomanes et 
francophobes qu’on jurerait qu’elles se sentent investies de la mission 
de formater les Québécois en vue de leur assimilation dans l’Amérique 
anglophone. Tout ce qui est québécois leur est étranger, leur pue au 
nez. Ils dénigrent, voire haïssent tout ce qui se crée en français. À 
l’opposé, leur esprit critique disparaît devant tout ce qui vient de 
l’Amérique anglophone, dont ils embrassent et étreignent la culture. 
Bref, pour renchérir sur le propos de Mme Payette, les animateurs de ces
 radios sont profondément aliénés, et irrémédiablement colonisés. Et 
même ceux qui voudraient les ignorer doivent subir quotidiennement cet 
affligeant spectacle.
Source: Le Devoir

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